Blog d'Étienne Pourcher
Claudy LEBRETON, Président de l'Assemblée des départements de France, dénonce les
récents propos de Madame PECRESSE qui – dans le cadre des élections présidentielles et
sous couvert d’une interview anodine – croit bon une nouvelle fois de stigmatiser les élus
locaux en évoquant un «pacte de gestion économe avec les collectivités» et en cas de
refus de leur part, un référendum auprès des Français.
Ce n’est pas d’un pacte d’économie dont les collectivités et la France ont besoin mais
d’un véritable contrat de confiance :
_ où l’impact des investissements des collectivités en faveur de la croissance serait
valorisé (elles sont responsables de 75% de ces investissements quand l’Etat n’en
assure que moins d’un quart) ;
_ où leur apport au services publics serait reconnu (les 4/5èmes du budget des
collectivités sont consacrés à des biens et services publics de proximité qu’elles
ont profondément modernisés depuis les lois de décentralisation,
lycées/collèges/écoles, routes, TER et transports publics, équipements sportifs et
culturels, crèches…) ;
_ où leur gestion serait félicitée (elles appliquent déjà la règle d’or et en 2010, leur
part dans le déficit public se limitait à 0,1 % du PIB et le montant de leur dette
est stabilisé depuis 1983 à 10 % de la dette publique) ;
_ où serait donnée une première réponse à la dette de l’Etat à l’égard des
départements qui assurent le financement et la mise en oeuvre des allocations
nationales de solidarité (APA, PCH et RSA)1.
Madame PECRESSE cherche à jeter le trouble chez nos concitoyens sur les capacités des
élus locaux à assumer leurs responsabilités, cela n’est pas tolérable au moment où ceuxci
attendent des responsables nationaux qu’ils leur tiennent un langage de vérité et de
justice pour répondre à leurs aspirations.
Chaque année, le Préfet vient devant le Conseil Général des Vosges présenter le rapport des services de l’Etat dans le Département. C’est l’occasion pour les élus de l’interroger sur les politiques mises en œuvre.
Voici les points sur lesquels j’ai interrogé Monsieur le Préfet cette année :
L’emploi
Le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite a des conséquences non négligeables sur le service rendu au public. Si certains slogans de campagne populistes sur le nombre de fonctionnaires ont pu être repris, je ne m’inscris pas dans cette logique tant je considère que les fonctionnaires qu’ils soient d’Etat, de la Fonction Publique territoriale ou encore hospitalière sont au service de l’intérêt général. Ainsi, la mise en œuvre de la RGPP dans notre département concerne beaucoup de services publics, comme par exemple l’Education Nationale et j’attire l’attention de M. le Préfet sur l’inquiétude des parents d’élèves, enseignants et élus. Par ailleurs cela concerne tout aussi bien les fermetures de classes dans le primaire que les dotations horaires des collèges, de la compétence du Conseil Général ou des Lyçées. Cela a des conséquences sur la qualité de l’enseignement dans un Département où les problèmes économiques et sociaux sont déjà grands… Par ailleurs, le sort réservé aux Auxiliaires de Vie Scolaire qui voient leurs contrats arriver à échéance et n’être pas renouvelé est souvent éprouvant pour eux alors qu’ils avaient démontré leur utilité.
Par ailleurs, l’emploi privé est également au cœur de mes préoccupations et le niveau du chômage dans notre département est insupportable. Pour aider les vosgiens à retrouver du travail, pôle emploi doit avoir les moyens nécessaires et j’entends dire que les conseillers ont jusqu’à 150, 180 voire 200 demandeurs à s’occuper ! dans ces conditions, comment assurer un suivi rapproché. Or, on le voit avec le CTP, la clé de la réussite est la disponibilité du conseiller et le suivi. Autre point : des « points emploi » ont vu le jour dans les Relais de Service Public des Communautés de Communes ; or, des subventions attendues depuis 2008/2009 ne sont toujours pas versées pour les investissements réalisés, notamment dans la vallée de la Fave et à Brouvelieures.
Le poids financier de l’Etat
Alors que les dotations aux maisons de retraite sont essentielles au bon fonctionnement de celles-ci et par conséquent au service aux personnes âgées, les dotations, plus générales, de l’Etat au Conseil Général des Vosges pour compenser les dotations de solidarité transférées (Aide personnalisée à l’Autonomie, APA, Revenu de Solidarité Active, RSA et Prime de Compensation du Handicap, PCH) sont insuffisantes quand la Dotation Globale de Fonctionnement stagne. Pour le Département des Vosges, la dette de l’Etat envers le Conseil Général s’élève déjà à plus de 113 millions d’euros et va s’accroître cette année encore. Déjà, des départements français ont engagé des recours envers le Gouvernement et je compte bien que le nôtre les suivra dans leurs démarches.
Concernant les fonds européens, trop souvent oubliés dans les dotations publiques, j’attire votre attention, Monsieur le Préfet, sur les difficultés rencontrées par les gestionnaires de fonds leader, comme le pays de la Déodatie mais cela est vrai dans toute la France. A l’heure où la France a peur de rendre à Bruxelles des crédits non consommés, je regrette que la France ait mis en place un système bureaucratique tellement complexe que, bien que nous ayons attribué des subventions localement depuis 2009, celles-ci ne sont toujours pas débloquées par l’Etat, mettant en difficultés entreprises, associations…
La Ruralité
Lors de la réorganisation de la gendarmerie, vous m’avez écrit que vous veilleriez au devenir du bâtiment de Brouvelieures afin de lui trouver un usage de service pour les habitants. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Alors que l’Etat s’apprête à signer un nouveau contrat Etat-ONF-Communes Forestières, deux rapports récents, l’un des services de Bercy en décembre dernier l’autre d’inspecteur généraux en mai semblent remettre en cause le régime forestier et solliciter plus encore les communes qui verraient leurs « frais de garderie » augmenter. Après la tempête de 1999 et la crise économique qui a vu chuter les ventes de bois tant en volume qu’en prix, les communes forestières ne peuvent supporter un nouveau mauvais coup….
En matière de captages d’eau, notre département de par son sol greseux et ses forêts de résineux , de nombreuses communes de notre département captent une eau acide qu’elles doivent neutraliser. Avec la disparition de la neutralite, la mise aux normes des stations de neutralisation vont coûter cher aux collectivités et le Conseil Général ne pourra supporter seul l’aide nécessaire. L’Etat devra y participer.
Enfin, en ce qui concerne les zones blanches de téléphonie mobile, le Ministre Lemaire m’a informé des communes vosgiennes retenues dans la nouvelle liste nationale des communes à couvrir. Mais qu’en est-il de la suite à donner ? quels financements ? quel calendrier ?
Je ne saurais conclure sans aborder la réforme territoriale. Vous connaissez mon opposition à celle-ci ; notamment sur la création du « conseiller territorial » pour des raisons de parité, de proximité géographique et donc de disponibilité pour les habitants, etc. En ce qui concerne la réforme de l’intercommunalité, si je déplore la méthode (qui n’est pas de votre fait, et je souligne votre volonté de dialogue) qui consiste à imposer des regroupements plutôt qu’à les encourager/susciter, je regrette également le calendrier précipité : pour le dialogue, les élus ont besoin de temps et il conviendrait de leur en laisser plus … il en va de la réussite de cette réforme.